Bonjour chers amis pronosoftiens,
Un peu de dérision pour quelque peu oublier la désillusion et la "honte" qui nous animent dès lors que l'on repense à la "figuration" de NOTRE équipe de France dans cette CDM 2010!
Le vrai faux procès de Raymond D. (1/4)Après six années d'une relation passionnée et conflictuelle entre Raymond D. et les Français, le Tribunal arbitraire du sport a été saisi pour prononcer le divorce. Voici le compte rendu d'audience d'un procès pas comme les autres (et bien entendu, fictif, complétement fictif...). Episode 1, première journée d'audience, Raymond D. à la barre.Le stade est plein à craquer, le kop bouillant, l'ambiance est celle des grands matches au Tribunal arbitraire du sport, pour le coup d'envoi du procès de Raymond Domenech. Le prévenu fait son apparition après avoir donné son analyse d'avant-match au greffier, qu'il a confondu avec un journaliste sportif. Une fois la musique de la FIFA et les hymnes passés, le président de la cour déclare officiellement ouvertes les festivités.
Solennels, les jurés prêtent serment, rapidement interrompus par le prévenu qui leur fait une causerie, en insistant sur la nécessité de jouer le 0-0 pour éviter que l'adversaire ne profite des faiblesses évidentes de l'axe défensif. Le président intervient, demande à l'impudent de s'asseoir, ce qu'il refuse de faire, préférant la position verticale pour mieux voir le terrain. Il reste debout, droit dans ses bottes à crampons, scrutant un horizon qui se limite pourtant aux lambris usés de la salle d'audience. La parole est récupérée en milieu de terrain par le greffier, qui procède au rappel des faits.
RAPPEL DES FAITS "Le prévenu, M. Raymond Domenech, né le 24 janvier 1952, a été footballeur professionnel de 1970 à 1986, il compte huit sélections en équipe de France. A la fin de sa carrière de joueur, il devient entraîneur, au FC Mulhouse (1984-1988) puis à l'Olympique lyonnais (1988-1993). Il intègre en 1993 la direction technique nationale de la Fédération française de football (FFF), en qualité de sélectionneur de l'équipe de France Espoirs. Il reste onze années à la tête des Bleuets, pour une finale de championnats d'Europe en 2002, et un quart de finale aux JO d'Atlanta en 1996. Le 12 juillet 2004, il est nommé sélectionneur national de l'équipe de France A. Il se présente alors comme l'homme de la rupture, pour une nécessaire reconstruction d'une équipe qui est alors 2e au classement FIFA, mais qui vient de perdre sans gloire ses titres de championne du monde (1998) et d'Europe (2000).
Les débuts sont difficiles, et la qualification pour le Mondial 2006 est acquise grâce au retour des ex-retraités, Zidane, Thuram et Makelele. Mais pour son premier grand tournoi international, Domenech atteint la finale de la Coupe du monde, la deuxième seulement de l'histoire du foot tricolore. Un succès qui lui permet de renégocier son contrat, prolongé jusqu'en 2010. L'Euro 2008 qui suit est un "échec retentissant" selon les mots du président de la FFF, Jean-Pierre Escalettes. Raymond Domenech est élu plus mauvais sélectionneur de l'Euro par le quotidien anglais The Times.
Contre toute attente, il est maintenu en place, après avoir promis de changer, non pas l'équipe de France, mais plus humblement lui-même. Sa communication, que le grand public ne comprend pas, est montrée du doigt, notamment sa demande en mariage à sa compagne lors de son analyse d'après-match qui suit l'élimination des Bleus au premier tour de l'Euro 2008. Raymond Domenech s'excuse ensuite pour cette démarche, qu'il qualifie d'erreur de communication.
Au bout d'une campagne de qualification 2010 désastreuse mais finalement récompensée d'un ticket pour l'Afrique du Sud après un barrage polémique contre l'Irlande, il devient le premier sélectionneur français à avoir qualifié son équipe pour 3 grands tournois de suite. Il bat également le record de longévité pour un sélectionneur à la tête de l'équipe de France. Mais la Coupe du monde 2010 est un fiasco incroyable : la France est éliminée au premier tour, Raymond Domenech est insulté par Nicolas Anelka dans les vestiaires à la mi-temps du match contre le Mexique, puis les joueurs font grève pour protester contre l'éviction du joueur, décidée par le sélectionneur et la FFF. Les Bleus sont la risée du monde, M. Domenech boit le calice jusqu'à la lie. Comme prévu, son contrat avec la FFF prend fin à l'issue de ce Mondial désastreux."
"JE N'AI TUÉ PERSONNE"Un silence de mort s'installe. Ce rappel des faits a suscité un certain émoi dans l'assistance. Un vautour s'est posé sur l'épaule du greffier, qui n'en prend pas ombrage. Quant au prévenu, il est resté d'un calme à toute épreuve, murmurant juste que tout ça ne l'étonne pas, c'était prévu, 4-2-3-1, c'est ça le système... Le président l'invite à s'exprimer devant le tribunal. Habillé d'un survêtement aux couleurs de l'équipe de France, Raymond s'avance, le profil altier, le regard fier, un début de moustache renaissante habillant ses lèvres. Après avoir enlevé d'un geste théâtral ses fameuses lunettes avec des petits ballons sur la monture, il prend la parole en s'adressant directement à la foule, et non pas au président.
Le vrai faux procès de Raymond D. (2/4)Episode 2, les experts et les témoins apportent leur modeste contribution à la cause.Après une première journée riche en émotions, le procès de Raymond Domenech reprend dans la confusion la plus totale. Le président a passé un savon à son assistant, qui avait convoqué les handballeurs de l'équipe de France après un malentendu concernant cette audience consacrée aux "experts". Le calme revient après que Nikola Karabatic a écopé de deux minutes de prison pour une faute peu évidente sur Raymond D., qui avait tenté de lui faire la bise après l'avoir confondu avec Yoann Gourcuff. Contrairement à une assistance encore choquée par le rappel des faits, qui a retracé le parcours du sélectionneur le plus controversé de l'histoire du football français, le prévenu semble de très bonne humeur. Il porte à nouveau ses lunettes petits ballons, qu'il a habilement recollées avec un ruban adhésif.
Le président appelle un expert psychologue à la barre afin d'en savoir plus sur les capacités de raisonnement du prévenu. Visiblement épuisé, le psychologue toussote un peu avant de soulever un énorme dossier, sur lequel est écrit en rouge le nom du prévenu. Il pose l'imposant paquet sur la table, puis se baisse pour attraper un autre dossier, tout aussi touffu. Suivent un troisième, un quatrième, et un cinquième, le dernier. La table s'effondre. Un soupir passe, le psychologue regarde ses dossiers par terre. "Tomberont pas plus bas...", déclare-t-il, "au contraire du prévenu..." Le président demande à l'expert si ledit prévenu lui semble atteint d'une ou plusieurs pathologies psychiatriques qui pourraient altérer ses facultés. "Lui je sais pas, mais moi ça commence à venir...", lâche l'expert.
Puis il se reprend : "Monsieur le Président, c'est la première fois que mes rapports se contredisent à ce point. A la question de l'état mental du prévenu (l'expert jette un coup d'œil vers M. Domenech, qui se frise une moustache imaginaire) on peut estimer qu'il cumule tellement de symptômes de tant de troubles que ceux-ci semblent s'annuler, et qu'il garde en apparence toute sa raison. J'ai relevé des caractéristiques d'un fonctionnement psychique égocentrique avec des tendances manipulatrices. Mais aussi parfois un délire paranoïaque, de persécution, un poil de mégalomanie, voire de mythomanie, sans oublier la peur du conflit, l'incapacité à choisir, quelques symptômes de Chimbondisme... je peux vous passer mes dossiers si ça vous intéresse, parce que c'est un cas très intéressant, passionnant même, mais surtout pour la science. Pas forcément pour le football..."
DÉBAT CONTRADICTOIRELe football, le mot est lancé. Le président, qui congédie le psychologue dépressif, appelle ensuite deux autres experts, docteurs en sciences du ballon rond. Un débat contradictoire a été organisé, et un comptoir de bar apporté, pour l'ambiance. Les deux hommes s'approchent, commandent un demi, la discussion s'engage dès lors que l'attention des spécialistes se déportent de la bière fraîche vers le personnage de Raymond D., qui était en train de demander son numéro de portable à un gendarme, "histoire de faire une petite surprise dans ma prochaine liste des vingt-trois".
Au grand désarroi de la cour, le débat est plus que contradictoire. Enigmatique, brouillon, sens dessus dessous, il est "domenechien". Un salmigondis qu'une cour de justice n'était sans doute pas prête à entendre, mais qui est malheureusement le quotidien des supporteurs de football depuis de longues années. Quand l'un des deux experts soutient que "Domenech, c'est l'entraîneur qui n'a jamais rien gagné", l'autre avance qu'il a "amené la France dans trois grands tournois de suite, et une finale de Mondial, et puis un sélectionneur n'a pas l'occasion de gagner un championnat et des Coupes de quartier tous les ans non plus, alors..." Le débat dévie sur le thème de la communication et de l'image des Bleus, les noms d'oiseaux volent, les fausses demandes en mariage fleurissent jusque dans la salle d'audience, suivies de près par un déluge d'insultes, inspirées d'un aphorisme célèbre prononcé par un joueur à la mi-temps de France-Mexique.
Un des deux spécialistes, tout en commandant un autre demi, craque : "Ça c'est bien les Français : les mecs, pendant soixante-dix ans on gagne rien au foot, tout le monde s'en balance, c'est un sport de beaufs", déclame-t-il. "Et d'un coup, en 98, on gagne et tout le monde est fan, et tout le monde a son avis, et tout ce beau monde de Footix débarque en croyant que la victoire en Coupe du monde, c'est normal. C'était juste la première fois de l'histoire, et la finale de Domenech, c'était juste la deuxième. On a vécu nos plus belles années, et de très loin. Les Anglais, z'ont pas vu la finale depuis 1966, les Espagnols sont puceaux, les Portugais itou, alors faut remettre un peu de contexte et arrêter de râler pour râler, sans rien connaître." "Pas faux", reconnait l'autre. "Mais c'est pas parce qu'on connait le contexte et la difficulté de la tâche qu'on doit oublier d'être exigeant. Faut justement capitaliser sur les victoires passées. Et puis le souci, et pourquoi les gens pensent qu'il est mauvais, c'est qu'il réussit l'inverse de ce qu'est supposé faire un entraîneur : il prend des joueurs très bons en club, et en fait des brêles en sélection. C'est un Midas à l'envers, il touche l'or et ça devient du plomb."
"NI POUR NI CONTRE"Le président chuchote qu'il commence à comprendre la complexité du problème, et demande que les témoins soient appelés. Malheureusement pour le président, qui comptait beaucoup sur l'avis des professionnels de la profession, l'audition se révèle aussi difficile à déchiffrer que celle des experts. Les dirigeants du football français défilent à la barre, chacun pour dire tout et son contraire, alors que le président de la FFF se félicite de la bonne expérience accumulée en Afrique du Sud, qui sera précieuse pour préparer l'Euro 2012 et le Mondial 2014. Quant aux joueurs, ils sont divisés. Certains ont fait passé un communiqué pour dire qu'ils avaient décidé de vivre dans "l'intimité des vestiaires". D'autres ont envoyé leur témoignage par SMS, ce qui pose des problèmes de procédure, même dans un tribunal sportif.
Quelques-uns ont toutefois accepté de se plier à leur devoir de citoyen, mais leur récit reste énigmatique, des affaires de "trois points", de "bien en place sur le terrain", d'adversaire qui mérite la victoire, et de manque de réalisme dans le dernier geste, sans parler de l'arbitrage... tout cela débité avec cette langue de bois que les footballeurs ont inventée pour éviter que les non-initiés ne percent le mystère de leur mental de champion. Le Lyonnais Jérémy Toulalan, toujours fidèle au poste, apporte finalement la conclusion à cette longue journée, dans son style caractéristique : "J'ai écouté ce qui se disait. Chacun a donné son avis. Je ne sais pas si c'était très utile. Raymond Domenech, moi, je n'étais ni pour ni contre." Le président prend acte, et lève la séance. Le prévenu envoie un bisou à Toulalan, puis lui ordonne de se replacer, et plus vite que ça. Dans son coin, le procureur se frotte les mains, son entrée est imminente.
Le vrai faux procès de Raymond D. (3/4)Episode 3, réquisitoire du procureur de la République du ballon rond.La tension est à couper au couteau. Tranquillement, le procureur de la République du ballon rond s'est avancé à la barre. Calme, il patiente quelques instants, afin que retombe une sourde rumeur qui monte de la salle, où des cris appelant au lynchage se font entendre. Le prévenu, qui cherchait Bruno Martini pour lui passer des consignes, a demandé à son avocat d'aller s'échauffer, "je te fais entrer à la 75e, t'es mon nouveau Govou". D'une voix claire et posée, le procureur tranche dans le vif.
"Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les jurés, Cher collègue... je me présente devant vous avec une mission particulièrement délicate : vous convaincre de l'évidence, vous faire croire que la vérité est celle que vous avez devant les yeux, et qu'il n'y a rien de plus que les faits, bruts, simples, les seuls à servir lorsqu'il s'agit d'écrire l'histoire. Il n'y a, dans l'affaire de Raymond Domenech contre le peuple de France, aucune anguille sous roche, aucun cadavre dans le placard, aucune pierre qui roule sans amasser de mousse ni d'œuf qui avale un boeuf.
"Et cette histoire simple, c'est celle d'un échec, auquel vous avez tous pu assister. Voilà bien un cas unique : vous avez tous été témoins, et tous victimes. Chacun de vous a souffert (quelques sanglots éclatent dans la salle). Et chacun de vous sait, au plus profond de lui-même, que seule la victoire est belle, et que de victoire, M. Domenech n'en a connu aucune. Je pourrais, pour en rajouter, vous rappeler que M. Domenech n'a jamais rien gagné. Ni titre, ni estime, et certainement pas sa place dans l'histoire du jeu ou dans la mémoire collective du ballon. Je pourrais expliquer qu'il a pris une équipe en reconstruction, et qu'il l'a rendue en lambeaux. Je pourrais réciter la litanie de l'Euro 2008, de France-Irlande, de la demande en mariage, de la liste des 30, de la Chine, de... (le président intervient pour demander au procureur de mesurer ses effets, et surtout d'éviter de martyriser ainsi le public, qui montre de nouveaux signes de faiblesse à l'évocation de ces souvenirs douloureux)... "Je pourrais, Monsieur le Président, Cher public, vous ressortir une revue de presse des plus instructives, où la moquerie le dispute aux insultes à peine voilées... Je pourrais évoquer tout cela, et laisser les simples faits s'imposer pour condamner le prévenu, le délit est si flagrant. Mais on se priverait alors d'aller au-delà. Et de juger vraiment, puisque nous sommes là pour ça.
"M. Domenech va certainement se défendre en nous rappelant que la victoire n'est pas tout dans le football, et de surcroit que ce n'est pas lui qui joue mais les joueurs. Certes, mais on ne critique pas la Ferrari quand on ne sait pas conduire. Et on peut perdre la tête haute et non gagner en faisant main basse, on peut éviter d'ajouter la disgrâce à la défaite, on peut ouvrir parfois la porte de sa tour d'ivoire à ceux qui sont prêts à vous aimer, à tous ces supporteurs livrés à eux-mêmes, lassés même de la critique qui fait pourtant partie du plaisir.
"La ligne de défense sera probablement basée sur ce postulat, déjà maintes fois répétées par le prévenu lui-même : il n'est qu'un homme comme nous, qui essaie, qui cherche, et qui ne trouve pas. Mais un sélectionneur doit-il être un quidam ? Quel terrible aveu d'impuissance, et d'incompétence... Un sélectionneur doit être plus que ça, plus qu'un homme, il doit être taillé dans la pierre, imperturbable, un visionnaire, quelqu'un comme mon papa, quelqu'un que l'on puisse tour à tour aimer et détester (le président fronce les sourcils, il semble que le procureur s'égare légèrement. Un petit coup de marteau discretos permet à tout cela de rentrer dans l'ordre)... Un sélectionneur, je disais, doit être l'exception et non la règle, il ne doit pas être comme nous, il doit être la chance pour nous autres, commun des mortels, de croire, d'y croire, d'en être.
"Domenech n'est donc qu'un homme, et c'est pour cela qu'il doit être condamné : il a été faible, il doit être sacrifié ('Prenez-moi à sa place ! Prenez-moi à sa place !' crie un homme en transe. Les gendarmes maîtrisent rapidement Sidney Govou)... Le pouvoir lui est monté à la tête. Il s'est montré incapable de tenir son rang, et d'exister au-delà de la fonction, qu'il a même dévaluée en plongeant la sélection dans la gabegie. Il s'est enfermé dans un rôle de victime, alors qu'il devait être le chef, le leader, celui qui voit avant les autres. Il s'est enfermé dans une posture d'incompris, mais jamais ses idées n'ont pu le sauver d'une arrogance vaine et stérile.
"Domenech n'est ni un intellectuel, ni un punk, ni un chef naturel, ni un technicien brillant par ses analyses et sa vision du jeu. Il n'est que l'ombre de ce qu'il voudrait être, un bon joueur de D1 propulsé sur une scène trop grande, un mauvais acteur de sitcom qui a trébuché en montant les marches, se croyant arrivé, et tout ce qu'il a fait ensuite, c'est sauver sa peau, défendre son bout de viande. Comme n'importe lequel d'entre nous, certes, mais il était dans un rôle qui exige autre chose, qui exige une grandeur, et qui ne s'accommode pas de l'usurpation et du déni de la réalité. Si Raymond Domenech est un artiste, c'est uniquement dans l'art de la manipulation et de l'affabulation. Vous pouvez aujourd'hui l'aider à reconnaître la réalité de sa situation. Et ainsi accepter, en paix, de le laisser partir, pour que nous puissions enfin, tous, passer à autre chose. Le procureur de la République du ballon requiert l'exil à durée indéterminée, en Irlande."
Le vrai faux procès de Raymond D. (4/4)Episode 4 : La plaidoirie de l'avocat de la défense... et le jugement final.Au lendemain du réquisitoire du procureur de la République du ballond rond, qui a provoqué un émoi certain au sein de l'assistance, c'est au tour de l'avocat de la défense de monter au créneau, ou à l'échafaud, c'est selon. La tâche s'annonce ardue, mais Maître X semble remonté (rappelons que, au vu des circonstances, l'anonymat lui a exceptionnellement été accordé, afin de le protéger de toute représaille). Il sait qu'il n'a rien à perdre, au contraire du prévenu, qui au début voulait se défendre lui-même, parce "la défense, ça me connaît".
Le silence se fait, Maître X entre en piste avec panache, en prenant le public à contre-pied avec un schéma tactique offensif.
"Monsieur le président, mesdames et messieurs les jurés, chers collègues, amis de la poésie, cessons ces enfantillages : oui, Raymond Domenech est coupable. Oui, c'est un perdant, et pour le prouver, il a perdu. Il serait vain de ma part de vous expliquer le contraire, le bilan n'est pas bon. En terme de football, il est déprimant. L'image, elle, est catastrophique. Son héritage, un champ de ruines. Alors oui, on pourra toujours ergoter sur les trois qualifications successives pour un grand tournoi, mais ce serait là une attitude défaitiste, une ligne Maginot, car la France est à sa place dans ces grands tournois, sa présence n'est en rien un succès, c'est juste l'ordre des choses, ni plus ni moins. Y être ne doit pas être un objectif en tant que tel, ne cédons pas à cette idée que le mieux est l'ennemi du bien.
Il y a bien cette finale de 2006, voilà un vrai succès, me direz-vous. Mais on sait désormais que celui qui décidait de la victoire est le même qui a précipité sa défaite, en taquinant du crâne le torse d'un adversaire... même dans une relative victoire, mon client a réussi à perdre tout crédit (de nouveau, quelques appels au lynchage se font entendre, mais ils sont de plus en plus isolés, la salle écoute la plaidoirie, disciplinée).
Raymond Domenech est donc un perdant. Il est même le plus grand perdant de l'histoire du football français, et il faut le remercier pour cela, le célébrer. Car la démonstration de Monsieur le procureur est fondée sur une très grave confusion : faut-il voir dans cette persistance de l'échec un mal si honteux ? Et si perdre n'était pas si négatif ? Gagner, quelle vulgarité, c'est une jouissance immédiate, éphémère... alors que perdre, c'est s'engager à réfléchir, à penser, à comprendre... Et si le football, compris comme une tragédie, un théâtre, ne prenait justement tout son sens dans l'apprentissage de la défaite, en se proposant comme un exercice cathartique à usage de la vraie vie, hors du terrain ? Et si la gloire n'était que 'le deuil éclatant du bonheur', pour reprendre les mots de Mme de Staël ?
Raymond Domenech a perdu, et nous avec lui. Remercions-le pour ce voyage en commun, cette petite mort qui doit nous faire apprécier la vraie vie, la nôtre, et non plus la sienne. Car perdre, c'est avoir vécu. Au final, s'il faut retenir une chose de notre Raymond national, c'est qu'il fut un révolutionnaire sans révolution possible. C'est là sa seule véritable défaite, c'est aussi la nôtre, sans aucun doute. Comme c'est aussi notre responsabilité, à tous, de l'avoir livré en pâture à une bande de joueurs qui n'ont rien fait d'autre que le maltraiter, l'insulter avec l'ingratitude des sales gosses qu'ils sont tous. Mais ils sont nos enfants. Et comment oser s'en prendre au sélectionneur, ce serait sa faute si ses joueurs sont devenus ingérables ? Ce serait la faute de l'instituteur si son élève préféré lui plante un couteau dans le dos en pleine leçon ?...
Mais je m'égare, le propos n'est pas là. Ce qu'il faut comprendre une bonne fois pour toutes, c'est que Raymond Domenech, c'est l'œuvre au noir. Sa mission n'était pas tant de construire, car il fallait surtout détruire. Il a été le seul à le voir, quitte à se couper l'oreille pour le bien du football français. Il fallait en finir avec le trop lourd héritage de 1998, déboulonner les idoles, casser les illusions. Brûler la terre devenue stérile... et offrir ainsi à son successeur le beau rôle, celui du bâtisseur. Le chevalier noir laisse donc la place au Président Blanc, mais Raymond Domenech est et restera le véritable artisan du futur de l'équipe de France. Il s'est sacrifié car les circonstances l'exigeaient.
VOTRE AVIS
A l'issue de son vrai faux procès, pensez-vous que le prévenu Raymond Domenech est...
Coupable, il doit être condamné à l’exil en Irlande : 71%
Non coupable, il mérite d’être réhabilité : 29%
Nombre de votants : 3755
Ce sondage est clos depuis le 29 juin 2010SOURCE : Un compte rendu réalisé par Erwan Le Duc (Le Monde)Allez ! Restons tout de même optimistes après ce si long épisode (Six ans) qui prend fin... enfin !
Souhaitons bonne chance à Laurent BLANC dans son entreprise Ô combien difficile, qui saura à l'avenir j'en suis sûr, nous faire retrouver la joie de voir évoluer NOTRE équipe nationale sous ses meilleurs aspects !
Bonne journée à vous...
Sportivement...
Phil